Un pop’clip incunable pour se souvenir que John Cage n’a pas été qu’un grand compositeur, mais aussi un visionnaire sur les potentialités du média télé, qui le montre invité à l’émission populaire « I Got a Secret ».
John Cage dès 1960 avait tout compris des potentialités du média télé, qu’il pulvérise en trois coups de cuillère à pot (de yaourt). © DR
< 27'08'09 >
Pop’clip, John Cage a un secret

(Pop’archive). Un compositeur aussi fondamental que John Cage a beau avoir couvert de son influence toute la musique de la seconde moitié du XXe siècle et d’autres arts connexes, il n’a pas a priori marqué de son empreinte l’art télévisuel… A priori, seulement. Car, peut-être qu’avant tout le monde, Cage avait compris ce qu’est la télé et comment s’en servir de la façon la plus putassière et en démonter du fait de sa simple présence, l’idéologie du spectacle de masse.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, Cage a joué le jeu pour le célèbre show popu hebdomadaire de la chaîne CBS, « I’ve Got a Secret », diffusé sur la télévision américaine en janvier 1960.

A cette époque, Cage enseigne la composition expérimentale à New York. Il a déjà inventé le piano préparé, introduit la notion d’aléatoire dans des compositions, notamment par les moyens d’injections d’ondes radio. Et nous sommes ici, huit ans après son iconoclaste « 4’33’’ », soit 263 secondes de silence « jouées » par David Tudor assis au piano suivant l’exacte partition dont il tourne les pages. Cette Œuvre/non Œuvre est un pavé dans la mare de la musique largement aussi retentissant que la « Fontaine » de Duchamp pour les arts plastiques. Comme l’animateur de « I Got a Secret » nous le dit, John Cage est bien la figure musicale la plus controversée de son temps. Sa première performance télévisuelle avec cette « Water Walk » était initialement écrite pour cinq radios et tout un instrumentarium hétéroclite qu’on ne se lasse pas d’entendre chuchoté à l’oreille de l’animateur en guise dudit secret. Mais, une brouille avec les syndicats sur la question des droits d’auteur empêchera Cage de brancher les appareils radio et d’en jouer les marche/arrêt comme prévu. Donc, il les détruit, en direct. Et pulvérise le spectacle lui-même.

Démesuré, visionnaire ou inutile, cet acte dit tout sur la télévision avec 40 ans d’avance.

Cet article a été initialement publié le 20 novembre 2007.

jean-philippe renoult 

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