Retour sur la 26ème édition du festival MIMI, qui s’est tenue à Marseille du 7 au 10 juillet 2011.
Le rock hybride sous toges et capes de Secret Chiefs 3 au MIMI 2011. © Mathieu Mangaretto
< 19'07'11 >
MIMI 2011 : sous le Mistral, le chou

(Marseille, envoyé spécial)

La 26ème édition du festival MIMI a donné son clap de fin il y a une semaine, à peine le temps de se remettre du kaléidoscope de sons et d’émotions qu’elle a engendré. Les fidèles lecteurs de Poptronics le savent bien, le MIMI, on en est gaga, autant pour les aventures qu’il incarne vaille que vaille (mais sa situation est fragilisée d’année en année par la valse-hésitation de ses bailleurs, DRAC en tête, une situation vraiment absurde, deux petites années avant que Marseille soit capitale européenne de la culture) que par une programmation aux avant-postes, loin, très loin du prêt-à-consommer que nous servent la plupart des festivals estivaux. Mais attention, le MIMI se mérite : après avoir attendu sous un soleil de plomb la coquille de noix qui emporte les quelques centaines de spectateurs (2000 au final sur les quatre soirées) vers l’archipel du Frioul, juste en face du Vieux Port et de ses vociférations, il leur faut ensuite gravir le sentier en lacets qui grimpe jusqu’à l’ancien hôpital Caroline, jadis en ruine, en partie réhabilité désormais et destiné à des projets culturels.

Certains piquent une tête dans une petite baie située juste sous le site, tandis que la plupart n’ont qu’une hâte : rejoindre le spot, aux allures de mini village « alter », agrémenté cette année de jeux vidéo vintage, d’installations lumineuses, de boutiques éphémères, et surtout profiter d’un point de vue imparable, soleil couchant à l’appui, sur Marseille. C’est une tradition, depuis un quart de siècle, chaque concert du MIMI est introduit par quelques mots de Ferdinand Richard, grand ordonnateur de la manifestation et géniteur de l’« esprit MIMI » lorsqu’il cognait sa basse au sein d’Etron Fou Leloublan - qui faisait le pont entre Magma et Beefheart. Charge à lui, donc, d’annoncer la prestation du Vienna Vegetable Orchestra, soit une soupe maligne archi-vue mais toujours aussi efficace et rigolote : une dizaine de musiciens équipés de légumes du marché, flûtes-carottes, tambours-calebasses, violon-poireau, au service d’une reprise littéralement massacrée du « Sâcre du Printemps » ou d’un torpillage de choux (on appelle ça krautrock).

Le public, un peu éteint par « Single Room », le pourtant épatant concert des deux locales de l’étape, la chanteuse Emilie Lesbros et la harpiste Rafaëlle Rinaudo, accompagnées pour l’occasion de Julia Kent (violoncelliste d’Anthony), tout en pleins et déliés, en redemanda et quémanda la soupe promise par les Autrichiens. Le lendemain, l’art du contrepied prit tout son sens puisque, lors de cette « Nuit contre le truc bidon » se suivirent Emmanuelle Parrenin et les Last Poets encore fringants. Parrenin tout d’abord, poétesse folk jamais vraiment remise des années 70 et soutenue par Flóp, toujours muni de sa moustache et de sa tendre ironie. Un concert sur le fil, jamais où on l’attend, organisant la tension entre épinette et guitare rock, poésie du quotidien et saillies à la limite de l’expérimental (grâce au jeu, élastique, du percussionniste chilien Cristian Sotomayor).

Emmanuelle Parrenin au MIMI 2011 (captation Orevo production) :

Puis vint le verbe. The Last Poets en personne et plutôt en bonne forme pour leur âge : après être entrés sur scène en brandissant leur tisane (véridique), les New-Yorkais déroulèrent avec conviction leur show de la réconciliation, plus proches que jamais de leurs racines africaines. Respect unanime pour ces papis du flow, derniers survivants de la génération spoken-word, bien orpheline depuis la disparition de Gil Scott-Heron.

Retour au rock le lendemain, après un hommage de Ferdinand Richard à Captain Beefheart, autre grand disparu de l’année et le concert-ballet plutôt détonnant « More More More... Future », orchestré par le chorégraphe congolais Faustin Linyekula. Surgis de la scène expérimentale de San Francisco, les Secret Chiefs 3 de Trey Spruance électrisèrent le Frioul avec leur rock (sous toges et capes) hybride et à quatre temps, mélange d’instrumentaux surf, brûlots noise et d’un bien étrange revival « prog » (soutenu par une violon électrique hors du temps). Et lorsque le Frioul tangue, on se prend à rêver à toutes utopies musicales encore à inventer, sous la voûte étoilée.

Secret Chiefs 3 au MIMI 2011 (captation Orevo production) :

benoît hické 

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