Greil Marcus en guest-star des Soirées nomade de la Fondation Cartier, 22 juin, 21h, 261 Boulevard Raspail, Paris XIVe. 10 euros.
Greil Marcus, pionnier d’une critique des influences sociales et politiques du rock. © DR
< 22'06'07 >
Greil Marcus, king of la critique rock, à Paris

Les concerts (Heavy Trash, Matmos, Lambchop) viendront plus tard. Pour lancer son expo Rock’n’Roll 39-59, la Fondation Cartier invite, dans le cadre des Soirées Nomade, l’essayiste Greil Marcus, totem vivant de la critique rock depuis qu’il en a explosé les coutures avec son comparse déjanté Lester Bangs. C’était le meilleur de la free press des années 70 (« Rolling Stone », « Creem ») quand ils étaient les premiers à prendre cette musique au sérieux et à mesurer les bouleversements générés dans la culture populaire d’abord, puis pour toute la société américaine.
« Le rock’n’roll est un mélange de bonnes idées rendues stériles par les modes, d’épouvantables nullités, d’atroces fautes de goût et de jugement, de crédulité et de manipulation, de moments de clarté et d’inventions inouïes, de plaisir, de jeu, de vulgarité, d’excès, d’innovation et d’exténuation complète », écrivait Marcus en 1975, dans « Mystery Train », son premier livre. Ses ouvrages, excellemment traduits, sont publiés chez Allia, certains disponibles en poche chez Folio Gallimard. En archéologue de la culture populaire, il plonge dans les mythologies blues (Stagger Lee, le Crawling King Snake, le Back Door Man), pour raconter en filigrane, à partir de quelques figures (The Band, Sly and the Family Stone, Elvis Presley…) une autre histoire des Etats-Unis. Cette technique brillante est à l’œuvre dans la plupart de ses ouvrages : « Dead Elvis » révèle le spectre du « King » dans l’inconscient US, « Like a Rolling Stone » est exclusivement consacré à la chanson éponyme de Bob Dylan qu’il révère.
Mais le grand œuvre de ce pur produit de la contre-culture, c’est « Lipstick Traces, une histoire secrète du XXe siècle » (1989). Un remarquable essai, dans lequel l’ancien étudiant en sciences politiques à Berkeley dévoile de multiples correspondances entre les contestations radicales dadaïste, situationniste et punk. Il dessine alors les contours d’un seul et même mouvement, qu’il voit culminer avec les éructations de Johnny Rotten dans « Anarchy in the UK », véritable mise en œuvre des principes lettristes aux formidables conséquences, « comme si par magie -cette magie pop qui a le pouvoir de connecter certains faits de société avec certains sons et de créer ainsi d’irrésistibles symboles de transformation de la réalité sociale – cette voix fonctionnait comme un nouveau genre de libre parole ». Analyse tortueuse et dense, « Lipstick Traces » vaudra à Greil Marcus de faire partie de la vingtaine de privilégiés auxquels Guy Debord, séduit par ses thèses, faisait envoyer ses livres.
Ce soir à la Fondation Cartier, le critique se penchera sur le cas Buddy Holly, comète à lunettes du rock fifties (l’immarcescible « Peggy Sue ») dont la disparition en 1959, à 22 ans, dans un crash d’avion dans l’Iowa, après à peine dix-huit mois de carrière, a choqué l’Amérique et marqué la fin du rock pionnier. Météorite aux influences multiples, jusqu’aux Beatles qui se sont baptisés scarabées en référence au groupe qui l’accompagnait, The Crickets. On imagine que Greil Marcus en analysera les stigmates dans une conférence inédite à Paris. Il y reviendra à l’automne pour la parution de son dernier opus, « L’Amérique et ses prophètes. La République perdue ? », toujours fondé sur le même constat : « L’histoire de l’Amérique telle qu’on la raconte depuis le début repose sur l’invention de soi et sur le sentiment national. » Ça ne vous rappelle rien ?
matthieu recarte 

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< 1 > commentaire
écrit le < 22'06'07 > par < store iFb bruit-direct.org >
un sacré trou du cul !