Poptronics au festival Art Rock, jusqu’au 11/05, à Saint-Brieuc (22).
Dans la fosse du Forum, à Saint-Brieuc cette nuit, les très attendus Poni Hoax ont produit un set déchaîné et néanmoins mélodique. © Benoît Hické
< 10'05'08 >
Art Rock, poussez pas il y en aura pour tout le monde

(Saint-Brieuc, envoyés spéciaux)

Est-ce son positionnement en centre ville qui fait qu’Art Rock parvient au grand écart plutôt réussi entre propositions très grand public et installations ou performances exigeantes ? Le festival rock, pop et nouveaux médias de Saint-Brieuc est de fait situé en plein cœur de ville.

La Bretagne, terre rock

Le « Village » en est le point central, scène ouverte sous tente sur la place que borde le petit théâtre de la Passerelle, petit bijou à l’italienne de la fin XIXe où était projetée hier vendredi, au deuxième jour du festival, la sélection poptronics du meilleur des clips et, juste à côté, le théâtre, qui abrite le « forum » où s’est produit hier soir l’inventeur du punk funk, James Chance, un peu figé désormais mais qui nous fournit la bande son idéale de l’exposition d’agnès b., « Des jeunes gens mödernes ». Presque la même qu’à Paris (pochettes d’albums, photos d’une époque révolue et réduite à son iconographie, pour une nostalgie fleurant légèrement la naphtaline), n’étaient les quelques affiches et pochettes de groupes du cru, la Bretagne étant naturellement une terre des plus rock, celle des Marquis de Sade entre autres, celle aussi qui a vu émerger ces festivals ancrés dans la culture locale, type Art Rock qui fête cette année ses 25 ans.

Royal de Luxe en première mondiale

Sous un ciel gris voilé, et avant une pluie de glaçons cathartique en fin de show, la dernière création de Royal de Luxe, « Les cauchemars de Toni Travolta », en première mondiale, débutait l’après-midi multiculturelle, comportant certes une part de folie, mais un peu poussive, malgré l’enthousiasme d’un public briochin conquis d’avance, prêt à attendre une heure dans un espace confiné - tiens donc, depuis quand le spectacle de rue ressemble comme deux gouttes d’eau à un spectacle en salle, confort en moins ? La belle énergie déployée par la troupe chilienne La Gran Reyneta, qui reprend à sa sauce très cabaret-commedia dell’arte des standards de Lisa Minelli ou Travolta, ne compense pas l’absence presque totale de ces effets spéciaux bricolés et grandes machineries baroques qui ont fait la marque de fabrique du Royal de Luxe de la grande époque (gigantisme débridé qu’on devrait retrouver en 2009 à New York). Pas si grave vu l’éclectisme d’une programmation transdisciplinaire où le grand public n’est jamais oublié, mais où les amateurs de découvertes et de sons décalés sont également servis.

Touche-moi, parle-moi, tue-moi !

Pendant que les Briochins s’enthousiasment pour le Rock’n’toques (des chefs étoilés du coin qui proposent une restauration communautaire pendant le festival), les quatre installations interactives au musée exigent du visiteur non qu’il participe (un principe de base des installations interactives) mais le poussent aussi à sortir de lui-même : face à la jeune femme de « Sho(u)t » de Vincent Elka, une estrade avec micro non amplifié où le visiteur doit non seulement s’exposer au regard des autres mais aussi tenter de communiquer avec la femme à l’écran dont le visage exprime différentes émotions selon l’intonation perçue. Les cris la mettent en colère, les injonctions peuvent la faire pleurer mais elle peut aussi bien répondre à un « bonjour » innocent qu’à un « lèche-moi » rentre-dedans. Déstabilisant ? C’est inscrit dans le titre de l’installation : shout veut dire crier, mais si on enlève le u, c’est tirer (et qui tire sur qui… l’interprétation est ouverte). Au dernier étage du musée, Natacha, figée et campée sur un tapis de senseurs, attend du visiteur qu’il vienne la toucher pour déclencher en arrière-plan des figures abstraites générées par l’électromagnétisme (la distance au corps, le toucher sont les deux manière d’interagir avec l’œuvre). L’interface, c’est la femme ! Dans « Se mi sei Vicino » (2006-2007) (si tu es près de moi), de Sonia Cillari, qui a déjà obtenu une tripotée de prix partout dans le monde (à Linz, au Japon, en Espagne), les enfants, d’habitude si prompts à triturer le joystick, s’approchent timidement pour lui tenir la main. Une belle manière de ne pas faire « que » jouer avec la culture.

Rock à tendance éclectique

Comme le résume « Ouest-France » dans son édition du jour, « Art Rock surfe sur toutes les vagues du rock ». Rayon prestations très très grand public, dans le grand chapiteau de la place Poulain Corbion, la foule s’enflamme dès 18h pour le rock de stade des Noisettes porté par la féline Shingai, puis déferlent les hordes de fans têtes blondes prépubères à l’arrivée sur la grande scène des petits prince du copié-collé, les BB Brunes, sur un « Melody Nelson » de Gainsbourg rapidement transformé par ces bébés rockers trendy en un « fuck you » inoffensif. Au côté des installations nouveaux médias de haute volée et des spectacles de rue ou de danse grand public (Decouflé, Royal de Luxe), Art Rock construit une petite musique pluriculturelle des plus agréables aux oreilles. Même lorsqu’elles sont très sollicitées, comme lors de la performance de Poani Hoax hier soir. Chouchou d’agnès b., le quintet parisien signé sur Tigersushi devait faire ses preuves au moment où sort son deuxième album un brin décevant (« Images of Sigrid »), un peu loin de la folie du tube « Budapest » qui les fit découvrir il y a deux ans. Qu’on se rassure, Nicolas Ker et ses sbires ont réussi à enrober leur rock racé d’atours électro tout en syncope, dans une ambiance très très chaude. Foin d’attitude et d’emprunts, la musique déclinée par Poni Hoax fut celle des groupes qui comptent. On attend aujourd’hui avec impatience le concert de Tunng (folk rock britannique tendance champi) et pourquoi pas ceux de The Do, Blood Red Shoes ou encore Adam Kesher, sous le ciel de traîne briochin.

benoît hické et annick rivoire 

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< 1 > commentaire
écrit le < 14'05'08 > par < elka vV8 emosmos.com >
un petit rapport sur elektra ? pas super détaillé mais vécu. ça vous dit ? vincent Elka.