« Pourquoi la création ne soutient pas la loi Hadopi », Rencontres Internet mon amour #5 Hors les murs-Marseille, le 17/02 à 18h30, dans le cadre de Riam (Rencontres internationales des arts multimédia, du 12 au 18/02/09, La Boate, 35, rue de la Paix, 13001 Marseille, entrée libre.
Précédé d’une mise en bouche artistique signée Annie Abrahams, « Je vous en prie, entrez » qui surfera sur la peur véhiculée par nos dirigeants.
Internet mon Amour invité par le Riam à Marseille, ou ici la conférence de presse avant le procès de The Pirate Bay, débuté lundi en Suède : comment changer d’optique et inventer le Web 3.0. © DR
< 17'02'09 >
Marseille, la riposte graduée se combat au Riam

Tous pirates et tous Tarzan ! Sarkozy l’a répété en début de mois, il veut en finir avec cette « jungle sauvage où il serait permis de piller les œuvres des créateurs ». C’est bien du Net qu’il parle et l’obsession présidentielle conduira au vote début mars de la loi Création et Internet (précédemment nommée Hadopi, que de facétieux activistes avaient renommée Hado-pipi de chat…). La France s’obstine contre vents et marées dans la voie du flicage et de la répression, alors même qu’aux Etats-Unis, les producteurs de disques, qui avaient les premiers engagé des poursuites contre les « pirates », viennent de lâcher l’affaire. En décembre, la RIIA (Recording Industry Association of America, les producteurs de musique) a renoncé à poursuivre les internautes lors de procès coûteux pour l’image des maisons de disques (35.000 personnes depuis 2003 tout de même).

Riposte graduée, juridiquement limite

En France, c’est donc le principe de la « riposte graduée » qui sera institué, autorisant in fine non seulement à punir les internautes fraudeurs, mais qui plus est à les priver d’accès au Net, et, partant, à priver les autres personnes du foyer dudit accès… posant quelques menus problèmes d’égalité face à la loi. Le tout sous la responsabilité de la fameuse Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), une entité administrative chargée de dire le droit, ce qui heurte bon nombre de défenseurs des libertés publiques (Sarkozy s’est débrouillé pour faire annuler le vote d’un amendement européen qui l’aurait empêché d’appliquer sa loi, mais la Commission l’a tout de même mis en garde contre cette dérive).

Poptronics vous le répète plus souvent qu’à son tour : ce projet de loi est non seulement à rebours de l’évolution de l’Internet, mais dangereux pour la démocratie, pour le Net et pour la création. En septembre, avec le réseau informel d’« artisans » du Web réunis sous l’appellation Internet mon amour, nous nous faisions le relais de « Téléchargez-moi », la première pétition à fédérer la scène du Net. 86 signataires au lancement, 662 aujourd’hui, pour dire non à cette loi « obsolète et crétine ». Aujourd’hui, poptronics embarque direction Marseille pour une rencontre « Internet mon amour hors les murs », à l’invitation du festival Riam (les Rencontres internationales des arts multimédias, dont poptronics est plutôt friand), pour faire le point sur les initiatives (artistiques et citoyennes) de pression sur les députés à l’échelle européenne.

Mobilisation de la communauté Internet

Dans ce débat pas si technique qu’il y paraît, la France tente en effet de faire valoir son point de vue pour l’Union européenne (argument : la riposte graduée permet d’éviter de trop lourdes amendes tout en dissuadant les jeunes générations de recourir au P2P), avec l’Espagne et la Grande-Bretagne en soutiens de dernière minute contre les pays du Nord. Du coup, la dernière initiative citoyenne en date est espagnole, et propose à tout internaute européen de finir ses mails par un appel à la démission des ministres de la Culture et, une fois entendus, de remettre les compteurs à zéro pour discuter de propriété intellectuelle. Molinapirate propose un concours de slogans (César Molina est ministre de la Culture en Espagne) et un Twitter dédié... Le mail à faire circuler (en anglais) n’y va pas avec le dos de la cuillère : « 2009 will go down in history as the year in which we simply dindn’t let them. Arrogance gets boring. »

Même chose en France, les initiatives se multiplient : la Quadrature du Net propose un « dossier à charge » à télécharger pour disposer de tous les arguments contre les partisans du projet, ainsi qu’un Médiakit (qui recense les extraits d’émissions ou docus réalisés autour des discours alarmistes de Sarkozy essentiellement). Read Write Web France propose de « voter pour (ou contre) le projet de loi Hadopi » en écrivant un mail-type à son député (en allant chercher la liste sur le wiki de la Quadrature...).

Changer d’optique

« Téléchargez-moi », disait la pétition des artistes du réseau. Il serait temps en effet qu’émergent de nouvelles façons d’envisager ensemble la rémunération des auteurs, sans opposer bêtement les téléchargeurs « irresponsables » aux artistes « spoliés » comme le faisait encore Luc Besson, dans une tribune publiée samedi dans « Le Monde », accusant la loi de ne pas aller assez loin pour lutter contre les affreux pirates... et tous les intermédiaires. En Suède s’est ainsi ouvert lundi le procès de l’un des acteurs les plus controversés du P2P, the Pirate Bay. Procès attendu depuis deux ans, et dont les comptes-rendus viennent une fois de plus démontrer le fossé qui sépare les pratiques culturelles massives du réseau des visions archaïques des protecteurs du statu quo ante.

Bref, il est urgent de réfléchir à une loi « 3.0 » Création et Internet (même si la loi Hadopi a toutes les (mal)chances d’être adoptée). Pour cette cinquième édition d’Internet mon amour, créé au début 2008 au Centre Pompidou pour réfléchir aux enjeux artistiques, culturels, économiques, politiques, sociaux et identitaires d’Internet, seront donc autour de la table à la Boate, à Marseille, les artistes Annie Abrahams et Agnès de Cayeux, l’activiste et historique du Net indépendant français Valentin Lacambre, à l’origine de l’hébergeur Altern et du registrar Gandi mais aussi de la Coordination permanente des médias libres, ainsi que deux membres de Poptronics, Cyril Thomas, théoricien en histoire de l’art contemporain, et... moi-même.

annick rivoire 

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