« Melo-meli », exposition d’Annette Messager jusqu’au 18/07, du lundi au vendredi de 14 à 17h, cabinet des dessins Jean Bonna, Ecole Nationale supérieure des Beaux-Arts (Ensba), 14, rue Bonaparte, Paris 6e (de 2,5 à 4 euros).
« La France qui chasse dehors » de la série « Faire des cartes de France ». © DR
< 30'05'08 >
Le « Melo-Meli » d’Annette Messager, joli méli-mélo dis !

Le titre « Melo-Meli » de la nouvelle exposition d’Annette Messager, au cabinet des dessins des Beaux-Arts de Paris, évoque les ritournelles et les « friandises langagières » d’un Boby Lapointe. Troisième artiste invitée dans ce lieu après Jean-Michel Alberola en 2006 et Joël Kermarrec en 2007, Annette Messager ne cesse de se placer là où personne ne l’attend.

La voilà qui dialogue avec sa propre création, des installations antérieures et des pièces plus intimes (on peut l’entendre en parler là). Plasticienne en perpétuelle quête d’histoires à raconter, elle avait offert en avant-première à poptronics cet hiver quelques-uns de ses badges dessinés. Ces icônes à nouveau à la mode, traitées comme support artistique par Agnès Thurnauer, Annette Messager les transforment en capsules narratives qui ponctuent et parasitent le visage de sa « tête badgée » (2007-2008), en caoutchouc noir, matière qu’elle affectionne depuis « Mes caoutchoucs » en 2002-2003 et qui animait sa pièce « Casino » (Lion d’or à la Biennale de Venise 2005). Certains des dessins originaux proviennent d’une relecture d’œuvres antérieures. Et si ces nouvelles créations étaient le fruit de sa confrontation intensive avec sa propre rétrospective au Centre Pompidou en 2007, qui s’installe dans les salles japonaises du Mori Art Museum à Tokyo durant le mois d’août 2008 ?

Le méli-mélo d’Annette Messager n’est en rien un capharnaüm, les multiples dessins permettent de pénétrer au cœur des hésitations, des doutes… Ils marquent un temps dans la création. Sur un large pan de mur, crayonnages et esquisses où s’élabore petit à petit son personnage fétiche. Des croquis rapides aux dessins plus complexes, l’artiste s’approprie le héros de la fable de Collodi et fait sien Pinocchio, lui donnant ainsi une forme d’autonomie dans son travail plastique. Sur le papier, jamais de très grand format, toujours à portée de main, les séries passées et présentes se nouent, s’articulent, se mélangent pour éventuellement donner lieu à un élément d’une pièce (« Mettre aux mondes », 2006). Délimiter, positionner, tronquer, élaborer, choisir, autant d’actions enregistrées sur le papier qui offrent un autre regard sur ses petites sculptures, composées de mappemondes en terre cuite.

Et puis, l’exposition cerne la manière dont les jeux de mots drainés par Annette Messager tout au long de sa carrière ne sont pas qu’une réaction à la lecture des journaux, mais naissent également de la figure esquissée. Avec une bonne dose de fine espièglerie, Annette Messager s’attaque à l’image de la France. Elle complète la série des dessins réalisés pour la Biennale de Lyon en 2000, « Faire des cartes de France ». Le contour de l’Hexagone se transforme en visage présidentiel pour donner la « France gaulliste » ou mute en vache folle. Ou en intestins, et c’est la « France digestive », clin d’œil à son « torchon digestif » de 2001 accroché dans la salle.

Rétive à toute forme d’autorité, presque en catimini, Annette Messager s’amuse avec les « grands pontes » en obligeant à lever les yeux, pour découvrir sur une même poutre, les bustes des célèbres personnalités qui ont marqué l’histoire de l’Ensba et des dessins anatomiques suspendus. Les bustes sont donc réincarnés… Un pied de nez, sans coup de force, à l’heure où tout le monde cherche la subversion et la transgression !

cyril thomas 

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