Entretien avec la Sœur GiGi Fa’Q des Sœurs de la perpétuelle indulgence après la Marche des fiertés et Solidays, sur la place de l’Internet dans le militantisme LGBTQI (lesbienne, gay, bi, trans, queer et intersexe).
Les Sœurs de la perpétuelle indulgence de sortie aux Solidays, à Paris. © DR
< 11'07'08 >
L’interview sans confession de Sœur GiGi Fa’Q

De Gaypride en Solidays, les Sœurs de la perpétuelle indulgence promènent un peu partout leurs cornettes et maquillages outranciers, pour accompagner leurs messages prophylactiques. Et sur le Net, ces croisées de la lutte anti-sida ont un tas de projets, comme l’ouverture de leur couvent dans Second Life. Sœur GiGi Fa’Q a répondu aux questions de poptronics après la Marche des fiertés et l’interview un poil provoc’ de Didier Lestrade, figure historique de la communauté gay, dans poptronics.

A quoi servent les Sœurs de la perpétuelle indulgence ?
Les Sœurs font vœu d’aider leur communauté et la société, de lutter contre les exclusions, de prôner la tolérance, la non-violence et la paix, de lutter contre le sida en apportant leur aide charitable. Elles répandent à tout moment des messages de prévention par la promotion du sexe sans risque. Elles se veulent visibles, outrageantes et même provocantes car elles pensent qu’il est parfois nécessaire de choquer pour faire réfléchir et changer les habitudes. Mais elles le font toujours dans la joie et dans un esprit de fête !

Les Sœurs sur le Net, ça donne quoi ?
Le couvent de Paris possède son propre site, certaines Sœurs utilisent d’autres plateformes pour communiquer, comme Facebook ou FlickR) ; Mère Innocenta a son Myspace, quant à Sœur Unity, elle diffuse quelques vidéos ici ou là. Nous utilisons également des listes de diffusion internes qui nous permettent de rester en contact et de préparer beaucoup plus facilement et efficacement nos évènements.

Pensez-vous un jour développer des Sœurs-avatars qui militeraient sur Second Life ?
Nous avons été approchées pour avoir un couvent virtuel sur Second Life, une merveilleuse idée. Faute de temps, ce projet demeure à l’état embryonnaire.

Comment adapter votre présence physique, théâtrale, dans les mondes virtuels (de Second Life aux réseaux sociaux) où les utilisateurs s’amusent à se débarrasser de leur apparence réelle pour une autre peau plus imaginaire ?
L’un des outils utilisé par les Sœurs est la distanciation entre le personnage de la Sœur et son avatar laïc. Cette distanciation facilite la reconnaissance et le dialogue. Ces critères n’étant plus aussi importants dans les mondes virtuels, notre spécificité risque d’être plus difficile à afficher, mais il faut essayer…

L’Internet a-t-il fait émerger un nouveau militantisme gay, lesbien, trans ?
L’Internet a déjà permis de développer de nouvelles pratiques militantes en permettant l’accélération de la communication. A titre d’exemple, la dernière campagne pour la suppression du logiciel Ardoise (la ministre de la Défense a dû reculer face à la pression des associations qui dénonçaient les risques de dérive qu’aurait permis ce programme qui servait à enregistrer des informations sur des suspects, notamment leur orientation sexuelle, leur handicap ou leur appartenance syndicale, ndlr).

Que pensez-vous de l’absence ou de la présence de messages de prévention sur les sites de rencontre destinés aux gays ?
Chacun et chacune est libre d’agir à sa guise. Tout comme les lieux de rencontre, les sites de rencontre se doivent de communiquer un minimum sur la prévention mais ce ne sont pas des organismes de prévention. La prévention autour du sida puis des MST a beaucoup évolué, le discours est multiple.

Que retenez-vous de la « fierté gay » 2008 ?
La Marche des fiertés est notre fête nationale, elle nous permet de rencontrer en une seule fois beaucoup de monde et d’expliciter notre message auprès de nouvelles personnes. Voir plus de vingt Sœurs en même temps interpelle. D’un seul coup nous ne sommes plus apparentées à des créatures mais à un groupe structuré avec une mission.

Que pensez vous des déclarations d’Alain Piriou, de l’interassociative lesbienne, gaie, bi et trans) dans « Libération » du 23 juin : « Nous savons que ce n’est pas cette année qu’une marche de 500 000 personnes fera changer d’avis Nicolas Sarkozy, qui a clairement dit qu’il était contre le mariage et l’adoption des couples de même sexe. » ?
Le message d’Alain Piriou n’est pas que la marche des Fiertés ne sert à rien mais que le comportement de notre président actuel sur l’adoption et le mariage ne sera pas changé par cette marche. Néanmoins, la marche des Fiertés est l’une des plus grosses manifestations parisiennes, sinon la plus grosse, et donne une visibilité extraordinaire à la communauté LGBTQI dans la société. La non-discrimination pour les couples homosexuels a été adoptée par plusieurs de nos pays voisins. C’est une attitude progressiste qui ne pourra être ignorée très longtemps par nos gouvernants, que cela soit le président actuel ou le suivant.

Jean-Yves Le Talec, l’un de vos cofondateurs, a récemment publié « Folles de France, repenser l’homosexualité masculine », qui retrace la place et le rôle politiques des « folles » (« sissies » en anglais), dans l’histoire des mouvements et de l’action politique. Etre à la marge des militants plus classiques, c’est un plus ?
Je ne pense pas qu’il soit judicieux de faire une différence entre notre efficacité et celle des associations « plus classiques ». Des folles sont également présentes dans ces associations et chacune a sa spécificité. Le personnage de la Sœur permet d’avoir une approche plus facile. Les Sœurs fondatrices sont sorties dans Castro (à San Francisco, ndlr) sans objectif : c’est de la réaction des gens qu’est né le mouvement des Sœurs de la perpétuelle indulgence.

Quels sont vos vœux (tant du point de vue politique que social) pour les années à venir ?
L’information et prévention sida, la visibilité et le rejet de la honte, la promotion de la joie universelle, la tolérance et la communication entre communautés, la charité, les vœux et le droit de mémoire.

cyril thomas 

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