Retour sur la soirée Kaleidoscope du 1er mars, à la Gaîté lyrique à Paris, première d’un tour du monde de propositions en réalité virtuelle pour casques HTC Vive, Oculus et DK2. 400 personnes s’y sont pressées, beaucoup n’ont fait qu’attendre des heures pour accéder à l’une des 32 propositions immersives dans la VR. Agnès de Cayeux, artiste et pop’chroniqueuse, a pu en voir quelques miettes, dont la pépite ovni « Notes On Blindness : Into Darkness ».
« Notes on Blindness : Into Darkness », de Peter Middleton et James Spinney, a d’abord été un court métrage avant de connaître une variation VR encore inédite. © DR
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« Kaleidoscope », zone immersive d’une marque VR à l’autre

De jeunes hommes bénévoles, futurs VR designers, nous accueillent à la Gaîté lyrique le mardi 1er mars 2016 à Paris, équipe médiatrice pour le compte d’un World Tour VR, la soirée KALEIDOSCOPE. Quelques rares jeunes femmes, nos bracelets VIP et les casques. A gauche, les Gear VR de chez Oculus rachetés par Facebook négociés made in Samsung, à droite les HTC Vive et plus loin les DK2.

O monde cruel. D’une marque à l’autre.

Cela fait plus de trente années que l’on se tape la technologie avant la poésie. Rebelote. Le très joli programme de papier distingue les 32 réalisations immersives par marque de casque. Cela dit, plus les minutes avancent dans cette grande salle modulable de la Gaîté, plus l’impression d’être à la Paris Games Week s’empare de nos corps, d’une queue à l’autre, attendant des milliers d’heures pour pouvoir tester, jouer, geeker et rêver quelques minutes.

Et là, en attendant des milliers d’heures, tu lis le programme papier et puis tu comptes 30 projets de mecs et 2 projets de filles. Pénible.


En attente de zone immersive à la Gaîté le 1er mars. © Agnès de Cayeux

Lorsqu’un jeune homme te sort de tes lectures, t’équipe d’un casque ©Machin et te propose de traverser deux courtes réalisations immersives : « Colosse » de Nick Pittom (marrant) et « Mad God » du légendaire Phil Tippett (chouette).

Puis une jeune femme me conseille « Notes On Blindness : Into Darkness ».

Un diamant digital.

« Notes on Blindness : Into Darkness-VR », 2016, bande-annonce :

« Notes On Blindness : Into Darkness » est un Ovni borgésien, un rêve de Kafka, un tome entier de « La Recherche », un danseur de Pina Baush, une image d’enfance de Chris Marker, un dépays, Tarkovski, Wenders, une hétérotopie, Beaudelaire, un paysage supplémentaire. « Notes On Blindness » est une immensité sensible, une écriture insensée, une invention précieuse, un diamant digital.

John M. Hull perd la vue. L’homme laisse une cassette audio, sorte de journal intime. Il décrit ce paysage. Pendant trois années. Celui de l’homme devenu aveugle. Je suis sous ce casque de plastique dont j’ai oublié la marque et j’écoute la voix du vieil homme et sa bande magnétique. Je regarde. Je dévisage. Je dépaysage. Cette contrée bleutée de corps fantômes, de manières autres de se mouvoir, de ce souvenir des sols, des arbres et des vents. Ce paysage transparent. Cette lumière inconnue. Sublimement réel ou irréel. Cette zone envisagée, ces routes tracées dans l’ombre qui disparaissent. Ces souvenirs de l’image. C’est extrêmement troublant et indescriptible.

D’où vient cet ovni digital ?


Immersion avec John M.Hull, qui a tenu le journal audio de son entrée dans la cécité. © DR

La première rêverie élaborée à partir de ce témoignage audio de l’écrivain et théologien John M.Hull est un court métrage sorti en 2013, « Notes On Blindness », réalisé par Peter Middleton et James Spinney :

« In 1983, after years of deteriorating vision, the writer and theologian John Hull lost the last traces of light sensation. For the next three years, he kept a diary on audio-cassette of his interior world of blindness. This film is a dramatization that uses his original recordings. »

La seconde rêverie sera un long métrage qui sortira bientôt...

Notre ovni digital est issu d’une collaboration artistique entre un producteur d’Agat Films (Arnaud Colinart), les deux réalisateurs du film (Peter Middleton et James Spinney), le fondateur d’AudioGaming sorti tout droit de l’Ircam (Amaury La Burthe) et 3 directeurs artistiques VR de cette même agence de création de jeux vidéo et d’objets sonores (Béatrice Lartigue, Arnaud Desjardins, Fabien Togman).

Ce récit immersif de 15 minutes est produit par AGAT Films & Cie Ex Nihilo (que les cinéphiles connaissent bien). Projet bien entendu soutenu par d’autres partenaires... tout est sur le site de notre bijou.

Précisons que ce diamant digital n’est pas encore distribué sous sa variation VR, qu’il le sera bientôt.

En attendant, nous allons très sérieusement rêver à une scénographie, un nouveau genre de salle, une proposition d’écoute visuelle pour ce 10ème art.

agnès de cayeux 

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