Pascal Comelade, en concert à Paris, le 9 juin à 20h, dans le cadre de Villette Sonique, au Cabaret sauvage, entrée de 9 à 18€.
Pascal Comelade © juan miguel morales. Il a signé des musiques pour des ballets, des docus, des films, écrit et croisé Nick Cave, Daniel Johnston, The Residents...
< 07'06'07 >
Comelade, l’inclassable catalan
Trente ans et plus déjà que Pascal Comelade explose les codes de la musique populaire, aux confins du rock, du folklore, de l’électronique et de la musique dite contemporaine. Une longévité accompagnée d’un statut à part, presque culte, qui fait de son concert à Paris samedi 9 juin, dans le cadre du festival Villette Sonique (lire l’article), un légitime événement. Musicien autodidacte sous influences multiples, de l’art brut aux surréalistes en passant par Steve Reich et les Pretty Things, le Catalan mutique à la timidité pathologique a inventé une musique instrumentale singulière. Un bric à brac nostalgico-ironique, créé au piano et sur divers instruments-jouets : guitare, xylophone, saxophone, batterie, toy piano… On trouve une excellente introduction à son univers dans ce documentaire de 1999, en espagnol. Une musique extraite de la poussière des greniers, qui sent la guimauve de fêtes foraines, et qui aurait été convertie au garage sixties et à Philip Glass. C’est encore lui qui se définit le mieux en écrivant sur son site (hors ligne en ce moment) qu’il « s’intéresse aux problèmes de la musique instrumentale non liée à l’image et non catalogable "Muzak" ».
Dans ses compositions entêtantes et ses multiples relectures de standards, Comelade, 52 ans, joue de la répétition, des clichés rock comme des phrasés de la musique populaire, il pastiche et fouille les mélodies jusqu’à la trame. Une sorte d’illustration du concept de la ritournelle cher à Deleuze (dont il a suivi les séminaires à Vincennes), dans le droit fil d’une tradition dada/surréaliste qui a marqué la Catalogne (notre homme baptise ses albums « Précis de décomposition bruitiste », « l’Argot du bruit », « Psicotic Music Hall » ou « la Filosofia del Plat Combinat »).
Né dans la musique électronique des années 70, Pascal Comelade demeure en marge des médias et du monde du disque (une soixantaine d’enregistrements, ceux des années 90 se trouvent encore, les derniers sont très mal distribués en France mais disponibles en Espagne). Willem, Robert Combas ou Hervé Di Rosa lui ont créé des pochettes originales. Il a avancé au gré de rencontres artistiques, a collaboré avec des gens aussi divers que Robert Wyatt, Lluís Llach, le groupe krautrock Faust, Jacky Liebezeit, mémorable batteur de Can ou PJ Harvey, (pour « Love Too Soon », qu’on peut passer et repasser sur le myspace de Comelade). Il a signé des musiques pour des ballets, des docus, des films, écrit (« Enciclopèdia logicofobista de la música catalana », « Ecrits monophoniques submergés »), et croisé Nick Cave, Daniel Johnston, Goran Bregovic, The Residents
Autant dire que le concert de samedi est plus qu’attendu. Il y sera accompagné du Bel Canto Orquestra (Pep Pascual, Gérard Meloux, Didier Banon, Jean-Paul Daydé), « groupe » à géométrie variable qu’il a fondé au début des années 80 avec Pierre Bastien (inventeur du Mecanium et d’autres machines musicales) et Cathy Claret. La scène est une très bonne manière d’appréhender son travail, qui le voit faire corps avec son piano, marmonnant, gesticulant, grimaçant, accouchant presque littéralement sa musique.
Artiste plus tout à fait underground (un documentaire est annoncé, bande-annonce ici), Comelade a fait des émules dans le monde entier. Son influence souterraine est aujourd’hui manifeste chez les Américaines de CocoRosie (qui jurent ne rien savoir de lui… à d’autres), le pillage est flagrant (et sirupeux) chez Yann Tiersen, la référence explicite au Japon, où le groupe Pascals ( !) s’est fait connaître en reprenant note pour note ses morceaux. A quand un Graceland à Céret, Catalogne ?
matthieu recarte 

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