« Code Source » de William Gibson, ed. Au Diable Vauvert.
William Gibson est présent le 15/03 à 16h pour le débat « Auteurs et numérique, vers de nouvelles formes d’écriture » puis de 17h30 à 20h et le 16/03 de 17h30 à 19h30 au Salon du livre de Paris.
« San Francisco Emotion Map » par Christian Nold et son projet BioMapping de « locative media ». © DR
< 14'03'08 >
« Code Source », la SF en GPS de William Gibson

Ça n’est pas tous les jours qu’on croise dans un roman des artistes férus de « locative media », une de ces nouvelles technos assez peu connue en France. Ça n’est pas tous les jours non plus qu’un groupe de fans créent un site suivant pas à pas la progression d’un livre, en l’illustrant de photos, de cartes, de citations, et ce, avant même sa parution. C’est que « Code Source », le dernier roman de William Gibson dont la traduction française vient de paraître Au Diable Vauvert, n’est pas un roman comme les autres.

William Gibson, qui sera présent ce week-end au Salon du livre de Paris, a été reconnu dès son premier roman, « Neuromancien », en 1984, après avoir forgé le terme cyberespace dès 1982. Cet Américain qui a choisi de vivre au Canada depuis les années 70, est un des pères du cyberpunk, ce mouvement qui, dans les années 80, a mis les réseaux informatiques au cœur de la science-fiction. Avec Bruce Sterling, il a d’ailleurs écrit « La machine à différences », précis d’uchronie steampunk, ou comment les ordinateurs à vapeur régentent l’Angleterre victorienne. Depuis « Identification des schémas » en 2003 dont « Code Source » est une sorte de suite, il a cessé d’écrire sur le futur pour se consacrer au présent ou au passé très récent (« Code Source » se passe en 2006) : la réalité a rattrapé la science-fiction, dit-il.

Le « locative media », ou « locative art », n’est pas un terme inventé par William Gibson, mais un mouvement artistique né avec la démocratisation de l’usage du GPS (Géo-Positionnement par Satellite) en 2000, l’armée américaine en ayant permis l’utilisation commerciale. Le « locative media » regroupe un ensemble de pratiques hétérogènes, des expériences cartographiques de Christian Nold aux jeux de réalité alternée de Blast Theory, en passant par des expérimentations menées lors d’ateliers à travers l’Europe dès 2003 (comme à Karosta en Lettonie).

Dans « Code Source », des artistes de Los Angeles créent des mémorials géolocalisés : il faut se rendre sur les lieux d’un événement (par exemple dans la rue où l’écrivain Scott Fitzgerald a eu une crise cardiaque ou devant le club où l’acteur River Phoenix est mort) pour visualiser la scène, grâce à un casque de réalité virtuelle. Plus pop et moins « nerd » que les vraies œuvres de géolocalisation, on croise aussi un robot en Lego blancs guidé par GPS ou une chambre envahie de coquelicots... L’invisible règne sur l’ensemble du roman, de la grille GPS qui nous englobe, dépassement du cyberespace (nous vivons directement dans le réseau), aux forces invisibles qui guident l’un des héros, les orishas, divinités de la Santeria (la version cubaine de la religion yoruba, venue avec les esclaves africains). Pour décrire sa méthode d’écriture, William Gibson parle de « speculative presentism », façon de regarder le passé à travers le filtre du présent, présent lui-même teinté de futur(s). L’écrivain cyberpunk donne les clés pour lire le présent. Et si on s’en servait ?

anne laforet 

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