Exposition « Living Box », jusqu’au 12/10 au Hangar à Bananes, quai des Antilles, île de Nantes, Nantes (44). Entrée libre.
Dans la toile de Jorge Pardo : "Untitled - Light house", 2002. © Locace/flickr
< 23'09'08 >
A Nantes, « Living Box » met le design en boîte

(Nantes, envoyée spéciale)

« Living Box », c’est l’espace habitable, l’espace de vie : dans l’exposition organisée par le FRAC des Pays de la Loire qui se tient en ce moment au Hangar à Bananes à Nantes, les « living box » sont pensées comme des cellules forcément critiques. Car ici, pas question d’un art au service du design, ni de l’inverse. Artistes et designers vont dans les interstices : entre art, design et architecture, détournements du minimalisme et grand kitsch, le regard circule et on évite l’effet rayon literie au magasin Printemps, pour une réflexion piquante, subtile. Scénographe de l’expo, la designer Matali Crasset, a mis du lien entre tous ces éléments : en gardant les 1 600 m2 ouverts, simplement séparés mais non cloisonnés par des sortes d’immenses stores vénitiens, et en répétant des formes sur les murs.

Des espaces à infiltrer...

Le décoratif, le nomadisme, ou encore la séparation privé/public, toutes ces notions interviennent dans ces lits clos et lits collectifs, ces cellules où l’on tient tout entier, debout, allongé ou assis. Comment s’extraire du monde en créant des systèmes de vie autonomes avec « Commune Bed » (1998) de Joep Van Lieshout, fondateur de l’Atelier Van Lieshout ? En s’infiltrant dans des cocons : on entre dans la « Light house » de Jorge Pardo, intérieur rouge lumineux, comme dans un ventre ; ou bien dans « Bedroom ensemble, Hommage à Claes Oldenburg » de Sylvie Fleury, qui fait d’une chambre vide et froide d’Oldenburg (« Bedroom ensemble », 1963) un monument de dérision à poils orange... Présence pop et engagement politique, aussi, à travers des pièces historiques de Archizoom, mouvement italien radical se prononçant pour « l’architecture de la superproduction » contre le fonctionnalisme. Rien à voir avec les « Cellules » si étranges d’Absalon, espaces blancs à habiter, qu’il dit lui-même à la limite entre le « système infaillible » et la « prison totale » : « J’exige de l’artiste un certain acte qui renferme en soi une attitude à l’égard du monde. »

... aux espaces à méditer

La Living box au XXIe siècle, bien après Charlotte Perriand ou les « machines à habiter » de Le Corbusier, c’est aussi la « Body architecture » de Lucy Orta, qui imagine des matériels de survie, ou encore les manteaux réversibles de Regina Möller, considérés comme des membranes, des cellules enveloppantes. Pour les frères Bouroullec, ce sont plutôt des « microarchitectures » que des objets fonctionnels, selon la définition traditionnelle du design. Des formes qui se dilatent, s’agrandissent à outrance pour investir l’espace, comme ce verre de whisky géant sur un plan qui s’épaissit progressivement (Patrice Gaillard & Claude), ou les « Pools and Pouf » de Robert Stadler, qui a éclaté le fauteuil Chesterfield, comme s’il était fondu, dispersé, dispatché. Des espaces où méditer, comme ce « Divan » de Berdaguer et Péjus, une structure ronde faite pour s’allonger qui tient grâce à des piles de livres de psychanalyse. Même respiration avec les murs de chiffons et de lumières de Pistoletto, posés là comme une alternative aux technologies complexes. Avec « La Partition », (« N° 1 Jouet - La Partition - Les Jetons », 2001), qui associe une peinture murale et des jetons en mousse au sol, Stéphane Calais s’introduit dans les brèches : entre peinture dans l’espace et sculpture où l’on s’assoit... « Des choses en moins, des choses en plus » de Pierre Bismuth est une cloison percée de ronds, dont les palettes une fois extraites sont empilées à côté, comme des choses dont on ne pourrait se débarrasser. Comme pour désigner le paradoxe et l’impossibilité à faire le vide.

Un espace est dévolu au paquebot dans la dernière partie de l’exposition, avec des pièces empruntées pour la plupart à l’écomusée de Saint-Nazaire. Le paquebot comme Living box idéale ? Pourquoi pas ? Un endroit à la fois extrait et ouvert sur l’extérieur...

marion daniel 

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