Le ciné-club de l’université de Bordeaux propose ce mardi soir une sélection de machinimas, ces courts-métrages réalisés à partir des moteurs de jeux vidéos, sélectionnés par une spécialiste du genre, Isabelle Arvers (qui est aussi commissaire d’expos). « Machinima » est un mot-valise qui contient machine et cinéma : le réalisateur s’émancipe des moyens de production classiques (et coûteux) pour produire des fictions générées par l’action d’une séquence de jeu. Comme le rappelle Isabelle Arvers, « Paul Marino, un des premiers réalisateurs de machinima, le définit comme un film conçu en temps réel à l’intérieur d’un environnement de synthèse ». Plus simples à produire que l’image de synthèse ou la motion-capture, le genre, apparu au début des années 90, était alors essentiellement le fait de fondus de jeux vidéo, qui prolongeaient ainsi leur plaisir à jouer.

Depuis que certains d’entre eux ont fait irruption dans l’actualité, à l’instar d’Alex Chan qui avait produit le premier docu-fiction après les « émeutes » en banlieue en 2005, The French Democracy, la qualité des machinimas n’a cessé de s’améliorer. Au point qu’aujourd’hui, la série My Second Life, réalisée par Douglas Gayeton pour l’excellente webtv néerlandaise Submarine Channel, vient d’être acquise par la chaîne américaine HBO qui l’inscrit aussi sec aux Oscars catégorie courts d’animation. Tourné dans Second Life, l’univers 3D en ligne, My Second Life est un vrai-faux docu sur la disparition d’un personnage dans le monde virtuel. Scénario semi-SF mené de main de maître par Douglas Gayeton, (déjà repéré pour avoir co-écrit et réalisé le jeu Johnny Mnemonic, avec William Gibson en personne, d’après le film cyberpunk de 1995), le soin apporté à la réalisation en fait un authentique objet filmique.

Au programme également, les interviews d’avatars-électeurs tournés depuis le jeu The Movies par Alex Chan entre les deux tours des élections en France, « World of Electors », ou le premier film sous licence Creative Commons (qu’on peut donc copier et transformer à l’envi, sauf usage commercial), Bloodspell, de Hugh Hancock. Cette série à épisodes sort d’ailleurs en version longue le 21 octobre. Basée sur le jeu Neverwinter Nights, Bloodspell est l’exemple parfait du machinima resté sous influence de son jeu de baston originel, entendre pour garçons amateurs de combats héroic fantasy uniquement. Autre élu de la sélection d’Isabelle Arvers, le dernier épisode de la série (française) multiprimée Bill et John, jouant du décalage entre les dialogues à l’humour très frenchy et des images hyperréalistes des simulateurs de vol (le premier épisode est visible sur machinima.com).

Le programme complet :

« The Days After », 2006, André Pesch, Apollo Productions, 10’14
« Le Danger Attaque à l’aube », 2006, série Bill et John, épisode 2, KBS Productions, 12’25
« This Spartan Life », épisode 4, 2006, Bong Dern, 11’48
« Male Restroom Etiquette », 2006, Phil Rice, Zarathustra Studios, 9’55
« Only », 2007, Phil Rice, Zarathustra Studios, 5’29
« Bloodspell », 2006, Hugh Hancock, Strange Company, épisode 1, 8’28
« World of Electors », 2007, Alex Chan, Eyeka, 1’43
« Fair Game », 2007, Strange Company, 0’55 et 1’36
« My Second Life », 2007, Douglas Gayeton, Submarine Channel, 35’

Pour tous les non-Bordelais, un extrait du docu « My Second Life » :

annick rivoire