Keith Rowe & Will Guthrie , le 31/01 à 21h, aux Instants Chavirés, 7, rue Richard Lenoir, Montreuil (93). Entrée : 7 euros.
Keith Rowe est un des pères de la guitare augmentée, transformée, voire transformiste... © DR
< 31'01'08 >
Keith Rowe, il joue de la guitare couchée

La règle des débuts d’années sans concert brûlant ne s’applique pas aux Instants Chavirés, à Montreuil, lieu de petite taille mais grand de réputation, qui , après avoir accueilli les Néerlandais de The Ex en résidence, conclut sa programmation de janvier avec en parangon des musiques improvisées, le guitariste britannique Keith Rowe accompagné du percussionniste australien Will Guthrie.

Keith Rowe n’a plus de guitariste que le nom, tant il appose à son instrument les transformations physiques les plus inconcevables. Sa carrière commence pourtant avec une guitare tenue bien droite au sein de l’orchestre de jazz de Mike Westbrook. Puis à l’aube des années 60, fasciné par le piano préparé de John Cage, mais aussi par des artistes visuels radicaux comme Jackson Pollock, Rowe commence à appliquer des procédés inédits à la guitare. « Comme Pollock, il me fallut abandonner la technique », déclare-t-il dans un entretien à « Paris Transatlantic » datant de 2001. Mais comment ? « En couchant la guitare à plat. » Depuis quarante ans, Rowe joue donc assis, avec une « guitare de table », et lui applique des variations de timbres, de tonalités, mais aussi des modifications plastiques et l’adjonction d’éléments exogènes qui peuvent aller des vis et écrous aux pales de ventilateurs.



Pour autant, la guitare « transformiste », inventée par Rowe, n’a rien d’un phénomène de foire. Avec une sûre avance sur l’époque, elle influence à partir des années 70 des pourfendeurs sonores de la six cordes comme Fred Frith ou Lee Ranaldo, ou encore l’étrange luthier Yuri Landman, célèbre pour ces instruments à cordes inédits qu’il fabrique pour Liars, Jad Fair et Sonic Youth entre autres. Rowe a également influencé Pink Floyd et particulièrement Syd Barrett. Voilà qui le place définitivement au panthéon des références rock underground. Alors que le rock l’intéresse peu. En 1965, il fonde avec John Tilbury et Eddie Prévost, AMM, le groupe le plus déterminant dans l’expansion des musiques d’avant-garde en Grande-Bretagne. Rapidement le trio devient un ensemble où joueront notamment Cornelius Cardew et Michael Nyman. Depuis, il a quitté le groupe. Avec son infatigable guitare de pèlerin, Keith Rowe essaime les festivals et scènes du monde entier. En live, les manipulations qu’il opère sur l’instrument procèdent d’une fascination aussi visuelle que sonore.

A ses côtés, ce soir aux Instants Chavirés, le batteur et percussionniste australien Will Guthrie, de très loin son cadet. Musicien vivant à Nantes, ce touche-à-tout bricolo qui emprunte aux musiques expérimentales, jazz, rock, ou électroacoustique, n’a rencontré qu’une seule fois le maître de la guitare préparée, à Metz en décembre 2007. La découverte et les risques qui en découlent sont aussi le charme des musiques improvisées.

jean-philippe renoult 

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