Garden Nef Party ; la Ferme des Valettes, accès piétons voie de l’Europe (côté tunnel) depuis la rue de Montmoreau, et voie de l’Europe (côté Ma campagne) depuis la plaine de jeux de Ma campagne, Angoulême, 20 et 21/07. Ouverture du site au public : 17h Pass 2 jours : 66 €, pass 20/07 sur place : 41 €, 21/07 : 35 €. Rens. : la Nef au 05 45 25 97 00.
La clique new-yorkaise !!! (chk chk chk) devrait enflammer le festival ce soir, avant LCD Soundsystem demain.
< 20'07'07 >
Garden Nef Party, Angoulême en nouvelle terre rock

On vous avait prévenus, ce week-end, il faut rallier Angoulême et sa Garden Nef Party. Ce festival rock, pour sa véritable première édition (après un tour de chauffe l’an dernier avec une soirée de quatre groupes), propose l’une des affiches les plus épatantes – si l’on met de côté la grosse baderne Muse, ce soir.

Le gratin des années 2000 a répondu présent : les sorciers electro LCD Soundsystem et les incendiaires  !!!, les électrons libres freak-folk Animal Collective et CocoRosie, les Anglais mordants d’Art Brut et la sensation nu-rave (dernier mouvement en date inventé par la presse britannique) Klaxons, les Américains chouchous du Web Clap Your Hands Say Yeah ou les Canadiens tendance Arcade Fire. Et en prime, le one man’s band ébouriffant Son of Dave, soit l’ex-Crash Test Dummies Benjamin Darvill et la légende folk Howe Gelb. Avec seize groupes sur deux soirées, et Luz, le dessinateur des dance-floors, en chef DJ pour assurer les transitions, la Garden Nef Party a tout pour emporter la mise et donner un peu d’air dans le calendrier local, entre les tristes Francofolies et les papys de Blues Passions. Et même au-delà, le Sud-Ouest demeurant une terre en friches encore peu fréquentée par les grands rendez-vous rock.

Forcément, ce line-up à renverser un hipster parisien (poptronics en rendra compte tout le week-end) n’a pas été réuni par hasard. Il est le fruit du travail patient des trois programmateurs de la Nef, la salle rock d’Angoulême (Jean-Louis Menanteau, David Fourrier, Francis Vidal, meneur de l’association bordelaise Allez les filles) et de Christophe « Doudou » Davy, de Radical Productions. Loin de l’agitation parisienne, ils sont de ceux qui font découvrir des artistes en devenir ou difficiles.

Le Vidal du goût musical bordelais

Pour l’occasion, poptronics est allé rencontrer Francis Vidal, qui a forgé le goût de générations de Bordelais. Il organise une soixantaine de concerts par an, en défricheur inlassable : il y a quatre ans, il était le seul à programmer CocoRosie en province (il y a quinze ans, c’était Fugazi) et proposera à la rentrée des concerts de Thedø, dont poptronics a déjà dit grand bien, I’m from Barcelona ou Malajube.

« C’est de plus en plus difficile de faire découvrir des groupes, regrette-t-il, résigné, dans les bureaux d’Allez les filles, installés dans une ruelle du vieux Bordeaux. Les gens vont de moins en moins aux concerts. Et passé trente ans, ils ne sortent carrément plus. » Lui en a cinquante-huit, dont vingt-cinq dans la musique. Il assure qu’une série de hasards l’a conduit à cette position de passeur. Il a débuté sur une radio libre, avant d’ouvrir son magasin de disques Trash (puis Slash) dans les années 80, où l’on trouvait les derniers imports punk et new wave, des fanzines, des fripes et des cassettes (« les cassettes, c’était le MySpace de l’époque »).

Il marquera ensuite la génération Noir Désir en devenant DJ dans les clubs de Bordeaux (Luxor, Babylon, Faucon Maltais, plus tard le Jimmy). Au milieu des années 80, il programme des groupes français dont personne ne voulait, rien moins que les Thugs, le groupe angevin bientôt plus connu aux Etats-Unis qu’ici (ils ouvriront dans des stades pour les stars du grunge) ou les Hot Pants (premier groupe d’un certain Manu Chao). Viendront ensuite les Suédois garage de Nomads ou l’Américain déglingue Willie « Loco » Alexander. « On était un réseau de passionnés, à une époque où la circulation de la musique était plus longue. La communication était plus difficile : le fax n’existait pas, les groupes envoyaient des cassettes… » Plus tard, il conviera le ban et l’arrière-ban du hardcore américain, du rock high energy, mais aussi des pointures soul et la crème du rock indépendant. A l’orée des années 2000, il se met enfin à son compte en fondant l’association Allez les filles (d’après un titre des Thugs).

Juppé l’anti-rock

Ce parcours assez exemplaire a été rendu possible par une remarquable abnégation : Francis Vidal a longtemps bossé en bénévole, vivant du chômage, ou employé en contrats aidés et n’est intermittent que depuis peu. Malgré ses états de service, Allez les filles tangue un brin, victime de son indépendance (les rares subventions représentent 5% de son chiffre d’affaire). L’affaire a fait grand bruit localement, où plusieurs concerts de soutien ont été organisés au printemps, dans l’indifférence polie du maire, Alain Juppé, qui soigne son électorat en passant 75% du budget culturel dans la musique classique.

Malgré cette précarité, Francis Vidal et son équipe (cinq salariés, trois intermittents) continuent sur leur lancée. Dernière idée en date, une « démothèque » en ligne qui compte déjà 200 morceaux de jeunes groupes de la région.

A la Garden Nef Party, deux impétrants charentais seront ainsi de la partie. L’un d’eux, le duo noise Gâtechien, a déjà tapé dans l’oreille du producteur américain Ted Niceley (Fugazi, Girls Against Boys, Noir Désir…) « L’idée à Angoulême, c’est de proposer une offre différente, axée sur l’idée de « rock esthétique ». On espère 18 000 personnes, même si on sait que les deux-trois premières éditions sont rarement bénéficiaires », assure Francis Vidal, avec le détachement un peu las de celui à qui on ne la fait plus.

matthieu recarte 

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