20 ans du Rex, du 14 au 31/05, Rex Club, 5 bd Poissonnière, Paris 2e.
Disque vynile à tirage limité de Laurent Garnier : « Wake Up » joué pour la dernière soirée « Wake Up » en juin 1994. © DR
< 21'05'08 >
Clubosaure Rex, préhistoire d’une Mecque du dancefloor

D’abord un fait : la club culture a toujours été à la traîne en France, loin derrière les Anglo-saxons, Allemands et Espagnols. Quand le Rex Club ouvre en 1988, ce n’est pas (encore) une révolution et la boîte est encore le parent pauvre d’un Palace auréolé 80’s, tandis que les Bains sont passés depuis longtemps du statut branché à celui de foutoir VIP. Les clubs gay s’en sortent mieux, du Boy à la petite Luna jusqu’au gros Queen, où viennent naturellement s’accrocher la house et la techno.

Flashback, début 1995. Une soirée « Storm », organisée par le magazine « Coda », présente Slam, duo des DJs écossais Stuart MacMillan et Orde Meikle, déjà fort d’un « Positive Education » qui dévaste toute une internationale du BPM. Les fondateurs du label Soma, en passe de signer le premier maxi de jeunes français inconnus, les Daft Punk, préparent leur première soirée au Rex. A pied, le chemin pour y parvenir nous fait descendre l’interminable rue du Faubourg Poissonnière. A mi-chemin se dresse l’énorme enseigne « Rex ». « My god, dit Stuart, c’est ça le Rex Club ! » « Euh, non, ça c’est le Rex Cinéma », fut ma réponse embarrassée, « le Rex Club, c’est autre chose. »… Le « petit » club est en effet au sous-sol de l’édifice, underground au vrai sens du terme. L’endroit est bas de plafond, ni glamour ni chic. Mais voilà, le son y est bon, les clubbers dévoués à la musique et les DJs au meilleur de leur forme. Oui, le Rex Club est bien dans la légende de la « house nation » (terme générique qui à l’époque regroupe tout ce qui se danse sur des BPM).

La genèse remonte à 1988, et à la fête « Jungle », pas cette drum’n’bass qui n’est pas encore née, mais une soirée révoltée, étrange, secouée par les primobeats de l’acid house. Un cri primal dans la programmation de ce lieu d’ordinaire voué au rock. La saga électronique du Rex commence vraiment en 1992, avec les soirées « Wake Up » de Laurent Garnier. Fort d’une reconnaissance en Grande-Bretagne et d’une carrière amorcée dans la mythique Hacienda fondée par New Order et Tony Wilson à Manchester, notre Lolo national revient au pays et prend résidence au Rex. Ce retour est aussi un des premiers ponts jetés en direction des divinités DJs de Detroit ou Chicago qui n’ont pas encore mis les bras sur les platines européennes. Ainsi, Jeff Mills, invité par Garnier au Rex en 1993, considère cette première fois comme un de ses plus grands souvenirs… Entre-temps, les « Wake Up » tissent un réseau de clubbers fidèles, raveurs, organisateurs et DJs pointus qui vivent le rituel miraculeux du jeudi. Pas de carré VIP (il n’y en a jamais eu) et un cadeau anniversaire smart et aujourd’hui collector : des maxi-vinyles monofaces à tirage limité constitués d’un inédit et d’un message gravé à même la cire sur l’autre face.

Laurent Garnier - « Rex Attitude » :

Morceau exclusif donné à la dernière soirée « Wake Up » du 2 juin 1994. Une deuxième version, plus courte, est ensuite éditée sur le premier LP de Garnier, « Shot In The Dark » .

Après que Garnier a ouvert grand la porte, d’autres soirées font date : les « Storm » de « Coda » du vendredi, où débutèrent Miss Kittin et Jennifer Cardini, les « Temple » le samedi avec Erik Rug en résident et ses invités épatants comme l’instable et génial DJ house de Chicago, Derrick Carter. La frange hardcore trouve aussi sa figure totem en Manu Le Malin, la drum’n’bass est fraîchement importée par Gilb’R, ancien de Radio Nova et futur créateur de Versatile Records. Bref en cinq ans, les courants majeurs de l’électronique trouvent au Rex leur agora, le lieu réussissant à réunir toutes les tribus autour d’événements, comme le premier live français de Matthew Herbert bluffant d’expressivité histéro-samplée, le DJ set de funambule expert de Dave Clarke ou encore le live de jeunesse des deux Daft Punk.

Daft Punk - « Da Funk » en novembre 1995, live historique au Rex Club :

Et ensuite ? « Le Rex Club est moins seul dans la course aux BPM », dit Fabrice Gadeau, actuel directeur du club qui a connu toutes les étapes précitées. « Les mutations du club sont aussi passées par une refonte du sound system et de l’espace. » En 1995, le Rex trouve sa forme actuelle, avec confortable cabine de DJ, sound system gonflé (au point qu’aucun autre ne peut rivaliser à Paris) et cross over tout numérique. En 2006, les enceintes mastodontes sont remplacées par 60 haut-parleurs perchés au plafond, et 6 caissons de basses directifs répartis sur le dancefloor. Prix de l’acquisition : 300.000€… De quoi tenir 20 ans de plus.

jean-philippe renoult 

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< 1 > commentaire
écrit le < 26'10'10 > par < moolz qLb free.fr >
Le premier maxi des Daft chez Soma date d’avant 1995. C’est "New wave", il doit être de 93 ou 94.